Le dossier de la lettre d'information

La démarche « Français sur Objectif Spécifique (FOS) » : Pour qui, pourquoi et comment ?

Chantal PARPETTE

Au-delà des compétences de communication au quotidien plus généralistes, l’enseignement de la langue française est parfois amené à répondre à des besoins très précis des publics, liés à un contexte spécifique. C’est l’objectif du Français sur objectif spécifique. Le CRIA a récemment interviewé Chantal PARPETTE, spécialiste reconnue sur ce sujet.

Si la définition et l’objet du Français Langue Étrangère « FLE » semblent aujourd’hui bien partagés, ceux du « FOS » paraissent moins lisibles pour certains. Pourriez-vous Mme PARPETTE, nous éclairer sur son histoire et le champ qu’il recouvre ?

Le « FLE » se répartit globalement entre le Français général (FG) et le Français sur objectif spécifique (FOS). Le premier traite des situations de la vie quotidienne au sens large, privées et publiques. Le FOS, lui, est né des besoins d’apprentissage du français par des publics visant une intégration professionnelle dans des délais souvent courts. Il s’agit alors de traiter des situations langagières qui ne sont pas celles du français général.

Pourriez-vous nous donner des exemples concrets de besoins et de situations auxquelles le « FOS » serait une réponse pertinente ?

On peut citer le cas de médecins étrangers en stage dans les hôpitaux français, de cuisiniers, d’étudiants en mobilité, d’employés des métiers de la propreté, de gardiens d’immeubles, etc. On le voit, les métiers et les niveaux de scolarisation exigés peuvent être très divers.

Où se situerait le FOS par rapport à d’autres appellations telles que « Français de spécialité », « Français des métiers », « Français sur Objectifs Universitaires », « Français de scolarisation »… ?

Quand nous avons décrit le « FOS » avec J-M. MANGIANTE en 2004, nous avons voulu le présenter avant tout comme une démarche d’élaboration de programme pour les publics décrits plus haut. Des termes comme « Français sur Objectifs Universitaires » et « Français de scolarisation » désignent donc des programmes d’enseignement du français destinés aux étudiants internationaux faisant leurs études en France pour le premier, et des programmes destinés aux élèves du primaire et du secondaire « nouvellement arrivés en France » pour le second. Tout comme Le français pour les infirmiers (paru chez PUG en 2017) est un programme construit sur la démarche FOS à destination des infirmiers étrangers venus travailler en France.

Vous dites que le FOS est une démarche. Si l’on veut élaborer un cours dans cette démarche, quelles sont les principales étapes à mettre en œuvre ?

La première étape consiste à analyser la situation qui semble légitimer un programme de français professionnel : qui est le public ? quel métier vise-t-il ? quelles compétences langagières doit-il acquérir pour l’exercer ?

La seconde étape, peut-être la plus importante et la plus lourde, est « le travail de terrain » qui consiste pour les concepteurs à se rendre sur place, dans le milieu professionnel visé, pour rencontrer les professionnels  en activité et découvrir auprès d’eux les environnements et les situations de travail auxquels le public sera confronté. Lors de cette étape, il s’agit également de collecter des données (enregistrement d’échanges oraux, documents à lire, à écrire, photos, interviews de professionnels du domaine, etc.).

Cette étape permet de déterminer les situations de communication et les informations (culturelles, institutionnelles) à traiter en priorité. Et de construire les séquences de formation linguistique.

La question du choix du matériel pédagogique en « FOS » est-elle déterminante ?

Certes, comme pour tout programme de langue, en sachant que très souvent, il n’existe pas de matériel parfaitement adapté aux besoins du groupe concerné et qu’il faut le créer, totalement ou en partie.

Peut-on se professionnaliser dans le domaine ?

On peut être « simplement » enseignant de FOS si l’on utilise un matériel édité, mais souvent enseigner dans ce champ exige de l’enseignant qu’il devienne concepteur, et ce sont d’autres compétences qu’il faut développer, comme cela doit apparaitre à travers les étapes décrites plus haut. La CCIP avec son programme IFOS, le BELC, proposent des formations et certains master FLE des modules dans le domaine. Un Master 1 & 2 à distance « FLE-FLS-FOS en milieux scolaire et entrepreneurial » (université d’Artois) lui est consacré.

                   

Chantal PARPETTE est enseignante/chercheuse à l’université Lumière-Lyon 2 Elle a publié notamment avec J.M. MANGIANTE, « Le Français sur Objectif Spécifique : de l’analyse des besoins à l’élaboration d’un cours » (éd. Hachette, 2004)